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Month: May 2021

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Comment se crée un jeu vidéo ? Serge Hascoët nous répond

Cheville ouvrière d’Ubisoft pendant plus de trente années, Serge Hascoët a dirigé « L’éditorial », le pôle dédié à l’orientation et la production des jeux vidéo. 

Fort de sa créativité et de sa vision du jeu vidéo, Serge Hascoët a été considéré comme un « propulseur de blockbusters ».

Serge Hascoët raconte aujourd’hui le processus de création d’un jeu vidéo.

Serge Hascoët revient sur son rôle au sein d’Ubisoft

Chargé de la stratégie éditoriale d’Ubisoft, le rôle de Serge Hascoët ne peut être réduit à une seule mission.

Le directeur créatif d’Ubisoft disait d’ailleurs dans une interview réalisée en 2018 pour Le Télégramme qu’il considérait « chaque matin comme un premier jour ».

Pour ce créatif, passionné de jeux vidéo japonais et de photographie, le respect du joueur dans la création d’un jeu est primordial.

La liberté qui lui est laissée doit lui permettre d’écrire sa propre histoire, de se fixer ses buts et de choisir les opportunités qui lui conviennent sans suivre un chemin déjà tracé.

Afin d’atteindre cet objectif de jeu, Serge Hascoët était chargé de définir la stratégie et de s’assurer de la qualité des jeux produits afin d’en faire de véritables marques.

Pour cela, l’enjeu était d’anticiper les envies et les attentes des joueurs à deux ans (puisqu’il s’agit de la période nécessaire à la production d’un jeu).

Un travail avec une équipe de développement, constituée principalement de créatifs, était ensuite engagé afin de décider des éléments phares du jeu, à l’image du graphisme et du game design. 

L’adaptation aux évolutions technologiques et à l’intelligence artificielle était également un point primordial à prendre en considération.

Les questions relatives au niveau de la qualité du jeu étaient ensuite adressées.

La création d’un jeu expliquée par Serge Hascoët

Serge Hascoët aborde la question de la qualité d’un jeu

Dès lors, si chaque expérience de jeu est unique et dépendante des choix personnels du joueur, comment définir la qualité d’un jeu ?

Pour Serge Hascoët, la qualité du jeu dépend de plusieurs critères objectifs ainsi que d’une part de subjectivité.

Le premier critère objectif est celui de la fluidité du jeu, autrement dit la prise en main. 

En effet, pour considérer qu’un jeu vidéo est réussi, la facilité de compréhension des possibilités offertes au joueur et de l’interface qui lui est proposée sont des éléments déterminants.

Par ailleurs, l’objectif de jeu doit être motivant pour le joueur et les sensations associées à la réalisation de ce but doivent lui procurer du plaisir.

Pour tester un prototype, Serge Hascoët raconte que de futurs clients sont invités à venir jouer au jeu pour que les équipes créatives puissent déceler leur compréhension du jeu et les sensations qu’ils éprouvent afin de l’adapter si besoin.

Dans un second temps, la subjectivité est à prendre en considération. 

Pour Serge Hascoët, celle-ci est fortement dépendante de l’innovation. Elle est déterminée par l’effet de surprise qui est procuré au joueur : est-ce qu’un élément nouveau est surprenant ou prévisible pour le joueur ?

Selon Serge Hascoët, la ligne directrice dans la création d’un divertissement doit être le plaisir pour le joueur.

Le créatif considère que le but du jeu est d’attirer le joueur dans un monde dans lequel il puisse évoluer, tout en lui donnant un cadre et des références. 

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Serge Hascoët raconte l’émergence des jeux « à monde ouvert »

La détection des talents, l’imagination de nouveaux univers et la valorisation de l’expérience du joueur ont été le quotidien de Serge Hascoët pendant près de trente-cinq ans au sein d’Ubisoft.

Pendant vingt-ans, ce créatif a dirigé « L’éditorial », le pôle central d’Ubisoft, consacré à l’orientation et la production des jeux vidéo.

Serge Hascoët revient sur les évolutions des jeux vidéo et raconte l’émergence des jeux dits « à monde ouvert ».

Serge Hascoët nous parle de « l’anecdote factory »

Aujourd’hui troisième éditeur mondial de jeux vidéo, Ubisoft a été créé en 1986. 

Recruté au sein de l’entreprise en tant que « game designer » en 1987, Serge Hascoët a évolué progressivement au sein de l’entreprise et a observé, voire impulsé, certains changements dans le style des jeux.

Serge Hascoët raconte en effet qu’Ubisoft est devenu au fil des années une « anecdote factory » en faisant évoluer les jeux vidéo vers des « mondes ouverts » dans lesquels rien n’est écrit.

L’enjeu est de permettre au joueur d’écrire et de vivre sa propre histoire, grâce à une sorte de scénario aléatoire.

L’objectif est de proposer au joueur une expérience unique dans laquelle sa compétence et son autonomie sont valorisées. En lui apportant ces possibilités, Serge Hascoët considère que le joueur sera davantage engagé et concentré dans le jeu au point d’atteindre l’état de « flow » c’est-à-dire un état d’engagement et de satisfaction maximale.

Cette évolution dans la conception des jeux vidéo, dont Far Cry est un exemple significatif, a répondu à une nécessaire adaptation aux besoins du marché afin d’être en phase avec les progrès constants de la technique.

Dans la conception d’un jeu, Serge Hascoët recherche un infini : dans un livre ou un film par exemple, la fin est écrite et inévitable contrairement aux jeux vidéo qui peuvent se dérouler sans fin.

Pour Serge Hascoët cette bascule des jeux linéaires vers des jeux « à monde ouvert » est une des raisons pour lesquelles le jeu vidéo est devenu la première industrie culturelle française.

La bascule s’est opérée depuis une dizaine d’années avec notamment le premier Assassin’s Creed qui se déroulait à l’époque des croisades et a permis aux jeux systémiques de prendre une véritable avance sur les jeux linéaires.

Serge Hascoët considère également qu’au-delà des évolutions propres aux jeux, le regard porté sur les jeux vidéo a lui aussi évolué.

Serge Hascoët raconte l’évolution des jeux vidéo

Les effets positifs des jeux vidéo selon Serge Hascoët

Le « trouble du jeu vidéo » a officiellement été reconnu comme un comportement à risque par l’Organisation mondiale de la santé (OMS) en 2019. Selon l’organisation, le « gaming disorder » serait un trouble lié à une pratique intense des jeux vidéo qui entraînerait une addiction et aurait donc des répercussions dommageables sur le joueur.

Serge Hascoët souligne toutefois que le jeu vidéo peut également avoir des impacts positifs et surtout actifs.

En effet, si l’inaction est l’un des dommages soulignés par l’OMS, Serge Hascoët souligne toutefois que certains jeux peuvent stimuler l’action comme « Just Dance » par exemple.

Par ailleurs, Serge Hascoët considère également que le jeu vidéo peut être envisagé comme un vecteur d’apprentissage social : les joueurs doivent en effet apprendre à comprendre l’autre dans un rapport d’interaction pour pouvoir progresser et aboutir à une solution collective.

Enfin, grâce aux neurosciences et sciences cognitives, le jeu peut être un outil permettant de lutter contre certaines difficultés scolaires comme la dyslexie.

Pour Serge Hascoët, l’exploration de nouveaux champs de possibilités est devenue le pendant indispensable des évolutions technologiques, avec notamment la réalité virtuelle qui révolutionne le métier.

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Interview de Serge Hascoët dans Le Monde

À l’occasion d’un entretien accordé au journal Le Monde en 2004, Serge Hascoët a abordé divers aspects de son métier.

Alors qu’il était directeur de la stratégie de contenus monde pour Ubisoft, aujourd’hui troisième éditeur mondial de jeux vidéo, Serge Hascoët revient sur son rôle au sein d’Ubisoft, la production française de jeux vidéo ainsi que les évolutions technologiques qui y sont associées.

L’interview de Serge Hascoët est disponible depuis ce lien.

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Les influences créatives de Serge Hascoët

Pendant vingt ans, le pôle créatif d’Ubisoft, appelé « L’éditorial » a été dirigé par Serge Hascoët, ce créatif entré chez Ubisoft à l’âge de 22 ans en tant que game designer.

Ayant contribué au succès, devenu mondial, du jeu Rayman en 1995, Serge Hascoët a également fortement participé à la renommée d’autres jeux, aujourd’hui cultes, tels que Watch DogFar Cry ou Assassin’s Creed.

Ces jeux dits « à monde ouvert » ont été élaborés par Serge Hascoët et ses équipes selon plusieurs inspirations et courants d’influence.

Permettre l’engagement total du joueur : l’objectif de Serge Hascoët

L’expérience que le joueur vit à travers le jeu est un élément indispensable afin d’en déterminer la réussite.

Pour Serge Hascoët, il est impératif que le joueur se sente pleinement engagé et investi lorsqu’il joue grâce à la possibilité d’écrire sa propre histoire.

L’objectif pour l’équipe créative est ainsi de permettre au joueur d’atteindre un état de satisfaction et de concentration maximale dans le jeu. Ce sentiment d’engagement total est appelé « état de flow » selon la théorie du psychologue Mihály Csíkszentmihályi élaborée en 1975.

D’autres courants d’influence et théories sont également d’une aide précieuse dans l’élaboration des jeux vidéo afin de satisfaire pleinement les attentes du joueur.

Serge Hascoët souligne ainsi que les conclusions du modèle PENS (« The player experience of need satisfaction ») selon lesquelles la compétence, l’autonomie et le lien avec autrui permettent l’engagement d’une personne dans une activité à long cours, ont aidé à la conception de jeux.

En effet, ces trois critères ont été appliqués afin d’offrir au joueur une expérience de jeu enrichissante et utile.

Dans cette perspective, les lieux et les personnages proposés répondent à un haut niveau d’exigence.

Serge Hascoët considère notamment la connaissance et l’expertise du terrain recréé comme une condition imparable pour en faire un terrain de jeu crédible et réaliste.

Cette observation du réel fait d’ailleurs écho à la passion de Serge Hascoët pour la photographie de rue ainsi que pour Ernest Hemingway.

Afin de permettre au joueur de devenir plus compétent, autonome et reconnu Serge Hascoët a impulsé plusieurs orientations au sein d’Ubisoft.

Serge Hascoët revendique un infini de possibilités pour le joueur

Un infini de possibilités : la vision de Serge Hascoët

Si certains éléments restent évidemment inchangés et inchangeables dans la conception créative d’un jeu vidéo, à l’image de certains codes et règles immuables, l’objectif de chaque jeu est d’offrir au joueur une expérience unique dans laquelle tout devient possible.

À l’image d’un match de sport, si l’on connaît les règles du jeu, les joueurs et le lieu de la rencontre, le score final n’est connu de personne à l’avance et dépend de plusieurs facteurs, comme l’investissement de chaque joueur, l’esprit d’équipe, l’arbitrage, les conditions météorologiques ou encore la chance.

Ainsi, le jeu vidéo peut être comparé au sport : comme dans un stade, on attend l’inattendu, dans lequel le joueur sera acteur et non pas spectateur.

C’est cet infini de possibilités que Serge Hascoët souhaite offrir au joueur dans la conception des jeux vidéo.

Dans cette perspective, les étapes de création d’un jeu répondent à une logique particulière dans laquelle l’élément le plus important est la définition d’un espace de règles de jeu et de règles physiques desquelles vont sortir une infinité d’histoires.

Il est notamment indispensable de réfléchir aux simulations du monde réel, par exemple la météo, la loi de gravité de Newton, les caractéristiques physiques et d’habilité du joueur ainsi qu’aux outils laissés à sa disposition.

La réussite d’un jeu est ainsi conditionnée à la multiplication des expériences et des événements possibles pour le joueur. À l’image d’un sport, un jeu est une machine à générer un milliard d’histoires.

Serge Hascoët relève également que le jeu peut prendre une dimension dans le réel et sur plusieurs aspects.

Par exemple, la reproduction des rues et des lieux emblématiques de Florence dans Assassin’s Creed a conduit à la création de visites guidées dédiées dans la « vraie vie ».

Outre l’exploration, Serge Hascoët considère également que le jeu vidéo peut véhiculer des valeurs positives et utiles pour la société. En conduisant le joueur à l’interaction avec autrui il peut être considéré comme un véritable outil d’apprentissage social et même être utilisé dans le cadre de certaines difficultés à l’école.

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